Chronique ouvrière

Salarié protégé,
plutôt la résiliation que la compromission !

lundi 20 juillet 2009 par Claude LEVY
arrêt de la Cour d’Appel de Paris du 17 juin 2009.doc
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On sait que la résiliation judiciaire prononcée à l’initiative du salarié et aux torts de l’employeur produit les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse (Cassation sociale 20/01/1998 Sté THYMERIAS Matériaux).

La résiliation judiciaire peut être également prononcée pour les salariés dits « protégés » depuis un arrêt de la Cour de cassation du 16 mars 2005 (Sté CARCOOP France).

L’arrêt du 17 juin 2009 que vient de rendre la Cour d’appel de PARIS dans l’affaire opposant Mme BHOYRO à la société GOM PROPRETE va encore plus loin en écartant une autorisation administrative de licenciement obtenue postérieurement à la saisine du juge judiciaire en résiliation du contrat de travail.

Ce faisant la Cour d’appel de Paris étend aux salariés protégés la jurisprudence de la Cour de cassation pour les salariés non protégés jugeant qu’il y a lieu d’abord d’analyser les raisons pour lesquelles la résiliation judiciaire est demandée avant de se pencher sur les motifs invoqués pour le licenciement (par exemple Cassation sociale 7/02/2007 Sté TEFID).

Le parallèle peut être fait aisément dans le cas de l’application de l’article L122-12 qui rend inopérante l’autorisation administrative de licenciement prononcée après le transfert du salarié protégé dans la nouvelle entreprise (cassation sociale 10/05/2001 Sté Promostoc, CA Paris 18ème C 11/04/2002 Emery Dufoug c/ Nunez et associés).

La Cour d’appel tire là les conséquences logiques du revirement de la Cour de cassation sur la prise d’acte de rupture par un salarié protégé qui prive de tout effet une autorisation administrative de licenciement obtenue ultérieurement, dans ce sens :

- Cassation sociale 3/05/2007 Association La Maison maternelle

- Cassation sociale 5/07/2006 Société Sté Saman

- Cassation sociale 13/07/2004 Mirjanic c/ Airport Shuttle et autres

- Cassation sociale 16/12/98 Alvarez c/ Hotels Concorde

- Cour d’Appel de Paris 22e C 18/12/99 Lopez Dolly c/ ASPIROTECHNIQUE

- Cour d’Appel de Paris 18e D 30/10/2001 DRINE c/ Me BELHASSEN liquidateur Sté la Cour Saint Germain

- Cour de cassation 30/01/2007 Wane c/ Essentiel

Ce n’est que justice !

A ceux qui prétendent que cette analyse ouvre aux salariés protégés une nouvelle voie pour rompre leur contrat de travail, ce qui affaiblirait la force du statut protecteur exorbitant du droit commun, les acteurs de terrain que nous sommes répondrons qu’il y en a marre des compromissions honteuses pour contourner par une transaction ce statut, mettant ainsi en porte à faux les organisations syndicales et l’inspection du travail.

La prise d’acte ou la demande de résiliation judiciaire du contrat de travail par un salarié protégé ont le mérite d’être « propres » et ouvrent une voie royale à une procédure pénale pour délits d’entraves.

La résiliation judiciaire du contrat de travail d’un salarié protégé aux torts exclusifs de l’employeur s’analyse comme un licenciement nul, avec toutes les conséquences de droit qui en découlent pour un salarié protégé conformément à la jurisprudence constante de la Cour de Cassation (26 septembre 2006 Machines SERDI).

Le salarié protégé peut donc prétendre :

- à l’indemnité pour violation du statut protecteur qui peut aller jusqu’à l’équivalent de plus de 4 années de salaires depuis la prolongation de la durée des mandats DP et CE,

- à ses indemnités de préavis et de licenciement,

- à une indemnité pour licenciement nul qui ne sautait être inférieure à six mois de salaires,

- à des dommages et intérêts spécifiques liées à l’exécution fautive du contrat de travail

Au total, avec le risque d’une procédure complémentaire au pénal, l’addition apparaît lourde pour l’employeur qui y regardera à deux fois avant de porter atteinte aux conditions de travail et de rémunérations des salariés protégés.


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