Chronique ouvrière

Un salarié doit connaître, à l’avance, les motifs de la convocation à l’entretien préalable

lundi 26 décembre 2011 par Alain HINOT
CA Paris 27sept 2011.pdf

L’article 07 de la Convention OIT n°158 énonce :

« Un travailleur ne devra pas être licencié pour des motifs liés à sa conduite ou à son travail avant qu’on ne lui ait offert la possibilité de se défendre contre les allégations formulées….. »

Art. 7 Conv. OIT n°158

Ces dispositions sont imparfaitement relayées par le code du travail :

« Au cours de l’entretien préalable, l’employeur indique les motifs de la décision envisagée et recueille les explications du salarié. »

Art. L.1232-3 CT

Une telle transcription ne permet pas aux salariés de préparer l’entretien préalable et de se défendre réellement « contre les allégations formulées » par l’employeur.

En effet si le salarié ne connaît pas en temps utile les griefs ( voir les éléments de preuve en respect du « principe du contradictoire » ), que l’employeur compte alléguer lors de l’entretien préalable, il ne peut recueillir des preuves ou prendre conseil.

Voir article de Mireille POIRIER Droit Ouvrier octobre 2010 page 516

Par application directe de l’article 07 de la Convention OIT n°158 et pour un respect scrupuleux des droits de la défense ( ou « à la défense » ), la lettre de convocation à l’entretien préalable devrait, au moins, indiquer les motifs exacts de la convocation ( ce qui fixerait aussi la nature du licenciement envisagé et le cadre d’un futur contentieux ).

Les dispositions du code du travail qui obligent l’employeur à indiquer dans la lettre de convocation « l’objet de l’entretien » ( R 1232-1 CT ), ne sont d’ailleurs pas correctement appliquées par la jurisprudence de la Cour de cassation qui considère encore aujourd’hui qu’il suffit que l’employeur précise qu’il envisage un licenciement.

En effet «  l’objet de l’entretien  », ce n’est pas le licenciement ( ou la sanction ) qui n’est que la décision que pourrait prendre l’employeur, laquelle n’est ni en discussion, ni en négociation, «  l’objet de l’entretien  », c’est bien le motif allégué ou envisagé de la mesure disciplinaire ou du licenciement économique ou personnel.

Ainsi, certains salariés se présentent à un entretien préalable sans même savoir si le licenciement projeté est de nature économique, personnelle ou disciplinaire et il est très rare qu’un employeur en dise plus en précisant le motif exact, véritable objet de l’entretien.

Dans ces conditions, il faut bien reconnaître que la tenue de l’entretien préalable ne respecte pas les droits de la défense du salarié dont font partie le principe de loyauté et du contradictoire et que l’assistance par un salarié de l’entreprise ou un Conseiller extérieur ne peut avoir aucune efficacité.

S’agissant d’un droit fondamental, son omission rend le licenciement nul ou, à tout le moins, sans cause réelle et sérieuse, car pris en violation de la convention OIT n° 158 ( garantie de fond ). Ceci constitue aussi une irrégularité de procédure spécifique.

Certaines conventions collectives nationales ( par exemple la CCN des Institutions de retraites complémentaires ) ou d’entreprises ( par exemple celle de la société AIR FRANCE ou LA POSTE ), obligent au respect des droits de la défense. L’employeur doit alors informer le salarié du motif exact de la convocation, voir, lui offrir la possibilité de consulter son dossier, avant l’entretien préalable.

L’arrêt de la Cour d’appel de PARIS du 27 septembre 2011 ici publié, illustre cette question en jugeant que l’absence de notification avant l’entretien préalable des motifs disciplinaire comme prévu par la CCN des Institutions de retraites complémentaires, ce qui constitue une garantie de fond, ne respecte pas les droits de la défense et rend le licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Ce que la négociation collective a pu faire en matière de garantie des droits de la défense ( il s’agit encore et seulement de prémices ), l’art. 07 de la Convention OIT, l’avait précédé et permis.

Emparons nous de ce thème pour rappeler aux tribunaux et à la Cour de cassation que le droit disciplinaire, concédé par les lois Auroux aux employeurs, ne plus d’affranchir du respect des droits de la défense.


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