Chronique ouvrière

La maladie du salarié peut-elle encore permettre à l’employeur de reporter l’entretien préalable ?

mercredi 29 février 2012 par Alain HINOT
Maladie et EP - Cass Soc 15 février 2012.pdf

Le report d’un entretien préalable par décision de l’employeur n’a de conséquences lourdes qu’en matière de sanction disciplinaire et notamment de licenciement pour faute.

Au terme de l’art. L 1332-2 CT : "Lorsque l’employeur envisage de prendre une sanction, il convoque le salarié en lui précisant l’objet de la convocation, sauf si la sanction envisagée est un avertissement ou une sanction de même nature n’ayant pas d’incidence, immédiate ou non, sur la présence dans l’entreprise, la fonction, la carrière ou la rémunération du salarié.

Lors de son audition, le salarié peut se faire assister par une personne de son choix appartenant au personnel de l’entreprise.

Au cours de l’entretien, l’employeur indique le motif de la sanction envisagée et recueille les explications du salarié.

La sanction ne peut intervenir moins d’un jour franc, ni plus d’un mois après le jour fixé pour l’entretien. Elle est motivée et notifiée à l’intéressé".
Ainsi, en matière disciplinaire, l’employeur doit notifier la sanction dans le mois qui suit la tenue de l’entretien préalable et il est de jurisprudence constante que la sanction ou le licenciement notifié au delà de ce délai est injustifié, sans qu’il soit nécessaire que le juge examine le motif invoqué par l’employeur.

On raisonne alors, comme si aucune lettre de sanction n’avait jamais été envoyée au salarié. Le premier entretien est alors considéré comme s’étant valablement tenu et le délai d’un mois comme une sorte de délai préfix emportant prescription extinctive du pouvoir disciplinaire de l’employeur.
Pourtant, la Cour de cassation a estimé le 07 juin 2006 (arrêt n° 04-43819 publié au bulletin), qu’en raison de l’impossibilité pour le salarié en arrêt maladie de se présenter à un premier entretien préalable, l’employeur pouvait valablement le convoquer à nouveau.

Il a aussi été jugé que lorsque l’entretien a été reporté à la demande du salarié et que l’employeur l’a accepté, c’est la date du second entretien qui sert de point de départ pour le calcul du délai d’un mois.

Dans l’arrêt du 15 février 2012 ici annexé, la haute Cour pourrait sembler réitérer sa jurisprudence, toutefois on notera que la cassation n’intervient pas au visa de l’art. L 1332-2 CT pour violation de ce texte, mais à celui de l’art. 455 CPC pour méconnaissance des exigences de ce texte, lequel prévoit notamment qu’une décision de justice doit être motivée.

En l’espèce la Cour de cassation reproche à la cour d’appel de Paris (arrêt du 18 mai 2010), de n’avoir pas répondu "au moyen de l’employeur selon lequel la maladie du salarié avait rendu impossible le maintien de l’entretien préalable à la date initialement fixée", alors qu’il lui était loisible de confirmer fermement sa jurisprudence de 2006.

Une nuance de taille qui permet de considérer que la position de la Cour de cassation sur cette question n’est certainement pas définitive et qu’il convient de maintenir qu’un premier entretien préalable ne peut être reporté qu’à la demande du salarié.


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