Chronique ouvrière

La loi dit de "sécurisation de l’emploi" a été votée envers et contre nous, avec de menus changements

mercredi 10 avril 2013 par Alain HINOT

Malgré le succès des 150 manifestation contre l’ANI du 11 janvier qui se déroulaient en même temps que le vote des députés, c’est fait. Ils l’ont adopté, mais avec quelques petites modifications intéressantes mais dont certaines signalent la grande naïveté de leurs auteurs.

Florilège des principales modifications adoptées par la chambre :

Article 1 : Généralisation de la complémentaire santé et prévoyance

La loi intégre des règles visant à assurer une "réelle concurrence transparente entre organismes", qui devront être précisées par décret.
Lorsque l’entreprise est déjà couverte par un contrat collectif, les garanties devront être au moins aussi favorables que celles prévues par le socle minimum légal et ce, garantie par garantie et non globalement.
Les spécificités du droit local d’Alsace-Moselle devraient être prise en compte par un décret.

Article 4 : Consultation du CE

Le CE serait consulté sur les orientations stratégiques de l’entreprise. L’avis du CE sera transmis aux organes de direction de l’entreprise, lesquels devraient "formuler une réponse argumentée".
Le CE pourra recourir à un expert-comptable (pour rendre son avis), qui s’ajoute aux expertises existantes et ne s’y substitue pas.

De nouvelles informations sont intégrées dans la base de données unique. La rubrique "investissement" comprend également désormais des informations sur "les contrats précaires, les stages et les emplois à temps partiel" mais aussi des informations en matière environnementale pour les entreprises concernées par le reporting social.
Les délégués du personnel pourront aussi avoir accès à la base de données et seront tenus à la même obligation de discrétion.

Article 5 : Désignation de représentants de salariés dans les organes de gouvernance

L’avis du CE devra être recueilli avant la modification des statuts de la société prévoyant les modalités de désignation des représentants des salariés au conseil d’administration ou de surveillance. Le cas échéant, il faudra consulter le comité de groupe. Par ailleurs, la désignation ou l’élection des administrateurs devra intervenir au plus tard 6 mois suivant l’approbation de la modification des statuts.
Les administrateurs élus ou désignés pourront bénéficier d’une formation à la gestion des entreprises à leur prise de fonctions, formation non imputable sur le crédit d’heures et prise en charge par l’entreprise. Ils seront bien des salariés protégés.

Article 6 : Droits rechargeables à l’assurance chômage

Les droits non épuisés à l’assurance-chômage, qui seront désormais pris en compte en tout ou partie lors d’une nouvelle indemnisation, pourront provenir de plusieurs reliquats d’indemnisation chômage

Article 8 : Temps partiel

La loi instaure une durée minimale de 24 heures par mois. La possibilité de déroger à cette durée minimale sera néanmoins possible par accord de branche étendu.
La possibilité, de déroger sans limite au principe d’une coupure unique maximum deux heures prévue à l’article L. 3123-16 du code du travail, lorsqu’un accord de branche ou d’entreprise le prévoit expressément, est supprimée. Une dérogation ne sera désormais possible que si l’accord fixe : les amplitudes horaires maximales, la répartition des horaires et des contreparties pour les salariés.
Les jeunes de moins de 26 ans poursuivant leurs études seront également soumis à cette durée minimum, mais ils pourront demander à effectuer moins d’heures.

Article 10 : Mobilité interne

La négociation sur la mobilité interne est encadrée :
- les limites imposées à la mobilité devront être posées en tenant compte du respect de la vie personnelle et familiale.
- l’accord du salarié devra être recueilli selon la procédure de modification du contrat pour motif économique.

Article 13 : Procédures de licenciement collectif

L’administration aura 15 jours pour valider l’accord majoritaire portant sur le PSE au lien de 8 précédemment (rappelons que la Direccte dispose de 21 jours pour homologuer un PSE).

La Direccte, l’administration devra prendra en compte, dans le cadre de la procédure d’homologation du PSE, le rapport qu’aura pu établir le CE sur l’utilisation du CICE dans le cadre de sa procédure d’alerte. Elle devra également vérifier la régularité de la procédure d’information et de consultation du CHSCT.

Les accords de méthode majoritaires ne pourront pas déroger aux règles générales d’information et de consultation du comité d’entreprise.

Article 15 : Ordre des licenciements

L’entreprise ne pourra pas privilégier les qualités professionnelle.

Article 16 : Forclusion et prescription

La forclusion de l’action prud’homale ramenée de 5 à 2 ans à compter de la rupture du contrat (la prescription en matière de salaire étant réduite de 05 ans à 3 ans) est un peu aménagée. Le salarié qui introduira après la rupture de son contrat de travail une action en paiement du salaire pourra le réclamer sur les trois années précédant la rupture de son contrat de travail.

Autrement dit la prescription triennale sur les salaires sera paralysée pendant les 2 années suivant la rupture du contrat.

Enfin, sont exclues de la forclusion biennale les actions relatives à l’exécution et à la rupture du contrat de travail en cas de discrimination. Les dommages et intérêts pourront réparer l’entier préjudice résultant de la discrimination, pendant toute sa durée.

***

Le texte sera examiné au Sénat à partir du 17 avril. Il n’y aura pas de seconde lecture (déclaration d’urgence), mais la réunion d’une commission mixte paritaire pour les articles qui seront modifiés par les sénateurs.

Il est donc urgent d’intensifier la lutte pour que la loi soit abandonnée ou profondément modifiée. C’est possible.


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