Chronique ouvrière

Attention danger : La rupture conventionnelle se conteste obligatoirement dans le délai de 12 mois, même si une procédure prud’homale est déjà en cours

jeudi 18 avril 2013 par Alain HINOT
Cass Soc le 10 Avril 2013.pdf

Un salarié saisi la juridiction prud’homale en janvier 2009 d’une demande en résiliation judiciaire du contrat de travail. Le 27 avril 2009 le salarié acceptait de signer une rupture conventionnelle de son contrat de travail prévoyant le paiement d’une indemnité spécifique de rupture. La convention de rupture était homologuée par l’autorité administrative le 29 mai 2009.

Néanmoins, lors de l’audience devant le CPH le salarié maintenait sa demande en résiliation judiciaire et en était débouté par jugement du 19 mai 2010.

Par des conclusions d’appel du 28 décembre 2010, le salarié demandait l’annulation de la convention de rupture et la condamnation de l’employeur à lui payer diverses indemnités au titre de la résiliation judiciaire du contrat de travail, demande de résiliation que la cour jugeait irrecevable.

Par cet arrêt de rejet du 10 avril 2013 (n° 11-15651 PB), la Cour de cassation valide la position des juges du fond qui avaient "constaté que l’annulation de la rupture conventionnelle n’avait pas été demandée dans le délai prévu par l’article L. 1237-14 du code du travail" (délai d’un an à compter de la date d’homologation de la convention), de sorte que "la cour d’appel n’avait plus à statuer sur une demande, fût-elle antérieure à cette rupture, en résiliation judiciaire du contrat de travail devenue sans objet".

Autrement dit : La signature de la rupture conventionnelle rendait caduque l’action en résiliation judiciaire et le procès était terminé puisque le salarié n’avait pas demandé l’annulation de la rupture conventionnelle dans le délai d’un an.

Pourtant le pourvoi du salarié n’était pas dénué de pertinence.

Il faisait notamment valoir "qu’en l’état d’un litige existant, le salarié ne peut renoncer pour l’avenir aux règles légales protectrices régissant la rupture du contrat de travail, et en particulier la résiliation judiciaire qui a les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse si elle est imputable à l’employeur, en acceptant une rupture amiable ou une rupture conventionnelle", et qu’en conséquence, "si un salarié accepte une rupture conventionnelle bien qu’il a déjà déposé une demande de résiliation judiciaire, le juge doit rechercher si la demande de résiliation du contrat était justifiée, c’est-à-dire si les inexécutions alléguées constituent une faute justifiant la résiliation du contrat de travail, avant de faire application de la rupture conventionnelle".

Il semble donc que par cette décision du 10 avril 2013, la Cour de cassation veuille sécuriser au maximum une rupture conventionnelle en exigeant de la partie qui entend la contester de saisir obligatoirement le juge de sa requête dans les 12 mois à peine de forclusion de son action, peu important qu’une instance prud’homale soit déjà en cours et même si celle-ci a pour but d’obtenir la résiliation judiciaire du contrat.

Pourtant on pourrait penser que l’unicité de l’instance prud’homale exonère le salarié d’avoir à exprimer son désir d’obtenir l’annulation de la rupture conventionnelle dans le délai d’action de 12 mois puisque précisément une action existe déjà et on pourrait aussi penser que si la saisine initiale est fondée sur une demande de résiliation judiciaire, le juge reste, en tout cas, saisi de cette demande.

Mais il est vrai aussi qu’en signant une rupture conventionnelle - non contestée explicitement - après avoir solliciter une résiliation judiciaire de son contrat, le salarié semble avoir, au moins implicitement, renoncé à sa requête initiale en trouvant un accord avec son employeur.

En tout cas, en ces temps ou se rétrécissent les délais d’action et où se réduisent les prescriptions (merci à l’ANI du 11 janvier 2013), on veillera scrupuleusement à agir dans les délais et on n’hésitera pas dans un cas comme celui décrit ci-dessus, à déposer une nouvelle saisine du juge prud’homale.

On préférera en effet une nouvelle saisine, où on profitera d’une audience intervenant dans le délai de 12 mois, car en matière orale un dépôt de conclusions n’est pas toujours efficace (voir site "chronique ouvrière" : rubrique "Les brèves d’Alain HINOT" - 24 janvier 2013).


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