Chronique ouvrière

Le juge des référés n’a pas digéré le menu "maxi best of" de la discrimination syndicale

dimanche 7 mars 2021 par Pascal MOUSSY
Ordonnance du 9 février 2021( n° 1).pdf
Ordonnance du 9 février 2021 (n° 2).pdf
Ordonnance du 9 février 2021 (n° 3).pdf

Le 29 décembre dernier, un article de l’Humanité nous alertait sur la répression antisyndicale résultant du licenciement de trois managers du McDonald’s Magenta (Paris 10ème) anciens représentants du personnel CGT du restaurant (Marie Toulgoat, L’Humanité du 29 décembre 2020, « Chez McDo, un peu de répression avec vos frites ? Licenciés de leur restaurant, trois salariés plaident mercredi leur réintégration devant les prud’hommes. Ils dénoncent les combines antisyndicales de leur direction »).

Moins de deux mois après, le 16 février, un autre article publié dans le même journal nous apprenait que les trois syndicalistes CGT avaient obtenu du juge prud’homal des ordonnances de référé enjoignant à la direction du McDonald’s de procéder à leur réintégration (Marie Toulgoat, L’Humanité du 16 février 2021, « Trois salariés licenciés par McDo obtiennent leur réintégration. Le conseil de prud’hommes de Paris a reconnu le caractère discriminatoire du renvoi de trois employés de l’enseigne de restauration rapide. Les anciens élus CGT reprendront le chemin du travail dans les prochains jours »).

Ces réintégrations obtenues dans un délai plus que raisonnable après la notification des licenciements sont une illustration de l’efficacité de l’intervention du juge des référés prud’homal.

La direction du McDonald’s Magenta avait mal digéré un mouvement de grève avec occupation symbolique des locaux observé en mai 2018, à l’appel de la CGT, par les salariés du restaurant.

Les agitateurs ne perdaient rien pour attendre. La vengeance est un plat qui peut se manger froid.

Au printemps 2020, l’employeur engageait sa campagne d’éradication des syndicalistes CGT qui avaient animé le mouvement collectif en qualité de représentants du personnel.

[De 2015 à 2019, les quatre mandats de représentants du personnel étaient exercés par les militants de la CGT. A partir de 2019, trois des quatre mandats étaient perdus par la CGT au profit de FO. Seule, une militante de la CGT était réélue en qualité de représentante du personnel suppléante au comité social et économique].

L’employeur allait agir en deux temps.

Au début du printemps 2020, il usait de mensonges pour manipuler un salarié du restaurant et l’amener à accuser de harcèlement moral l’élue CGT au comité social et économique et un des anciens représentants du personnel CGT, qui venait de perdre depuis peu la protection attachée à l’exercice de son ancien mandat. La direction envoyait purement et simplement une lettre de licenciement au militant CGT n’ayant plus d’activité représentative et déposait auprès de l’inspection du travail une demande d’autorisation de licenciement de l’élue CGT au comité social et économique.

Au cours de l’été 2020, les deux anciens représentants du personnel CGT restants faisaient à leur tour l’objet d’une procédure de licenciement, se voyant reprocher des propos menaçants à l’encontre de leurs collègues de travail et de subites fautes professionnelles répétées (l’un des deux collectionnant pas moins de cinq procédures disciplinaires en un mois et demi…).

Le 23 juillet 2020, l’Inspecteur du travail refusait de délivrer à l’employeur l’autorisation de licenciement sollicitée après avoir considéré que les agissements fautifs imputés à l’élue CGT au comité social et économique n’étaient pas établis. Le salarié incité par la direction du restaurant à se plaindre d’un harcèlement et de comportements violents de la part de la militante syndicale s’était rétracté et avait dévoilé les manœuvres de l’employeur qui l’avait conduit à mettre injustement en cause sa collègue de travail.

La lecture des trois ordonnances prud’homales du 9 février 2021 se suffit à elle-même.

Le juge des référés prud’homal, après avoir relaté le contexte dans lequel a été notifié chacun des trois licenciements, fait ressortir en quoi, pour chacun des trois syndicalistes CGT du McDonald’s Magenta, les motifs inscrits dans la lettre de licenciement ne sont en définitive que des prétextes visant à dissimuler une discrimination syndicale.

La formation de référé ordonne en toute logique à l’employeur de poursuivre, à titre provisoire, le contrat de travail de chacun des trois salariés discriminés et de verser à chacun d’entre eux, à titre provisionnel, une indemnité correspondant à la somme due pour la période comprise entre le licenciement et le retour au travail.

Le syndicat CGT McDonald’s Paris et Ile-de-France, qui était partie intervenante, obtient également une provision sur les dommages et intérêts en réparation du préjudice causé à l’intérêt collectif de la provision par des licenciements constitutifs d’une discrimination syndicale.

Le patron du McDo Magenta n’est pas au bout de ses peines. Un des trois managers ayant obtenu le droit de réintégrer les effectifs du restaurant a clairement déclaré que les tentatives d’intimidation de l’employeur n’avaient pas signé « l’arrêt de mort » de leur activité syndicale. « On continuera toujours… » (article précité de l’Humanité du 16 février 2021).


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