Chronique ouvrière

Le licenciement portant atteinte au droit fondamental à la paternité est nul

jeudi 23 octobre 2014 par Alain HINOT, Ghislain DADI
CPH Nanterre 26 septrembre 2014.pdf

Une toute petite protection contre les licenciements a été instituée par la loi n° 2014-873 du 4 août 2014 (article 9) au bénéfice des pères salariés.

Le nouvel article L 1225-4-1 du code du travail édicte : « Aucun employeur ne peut rompre le contrat de travail d’un salarié pendant les quatre semaines suivant la naissance de son enfant.

Toutefois, l’employeur peut rompre le contrat s’il justifie d’une faute grave de l’intéressé ou de son impossibilité de maintenir ce contrat pour un motif étranger à l’arrivée de l’enfant. »

L’objectif de cette mesure semble être d’aligner a minima le régime de protection des hommes sur celui des femmes qui, de longue date, bénéficiaient légitimement d’une protection post-partum pendant les quatre semaines suivant la fin du congé maternité.

Malgré ce léger progrès, les pères ne pas protégés pendant la durée de leur congé paternité à la différence de leurs compagnes et ce, encore moins pendant la durée de la grossesse de celles-ci.

En effet, le congé paternité d’une durée de onze jours calendaires consécutifs (qui s’ajoute au congé de naissance), est accordé au père salarié après la naissance de l’enfant et doit être pris dans les quatre mois qui suivent.

Or, il existe encore des employeurs qui souhaiteraient que la présence de leurs salariés au travail ne subisse pas les aléas de la paternité.

Le cas suivant a été soumis au Conseil des Prud’hommes de Nanterre :

Un salarié bénéficiant d’un congé paternité avait été licencié pour faute grave. Or, la lettre de licenciement lui reprochait, parmi plusieurs griefs (insubordination et dénigrement), d’avoir bénéficié d’un congé paternité. Cumulé à d’autres retards, cela constituait, selon l’employeur, un manquement à l’assiduité.

Par un jugement 26 septembre 2014 (ci-annexé) pris en formation paritaire le Conseil des prud’hommes de Nanterre annule le licenciement

Pour juger de la nullité de la rupture, le Conseil considère que l’employeur a porté atteinte à un droit fondamental et s’appuie sur le régime de la discrimination.

A notre sens, cette tentative de rattachement à une nullité textuelle n’était peut-être pas nécessaire, puisque l’employeur, qui avait visé expressément la prise du congé paternité comme un manquement à l’assiduité au travail, avait en bien contesté au salarié son droit fondamental à la paternité, de sorte que sa décision était nulle sur cette seule constatation.

En effet le droit à la paternité et à son respect est incontestablement fondamental et inaliénable car il se dégage de la notion de « vie privée et familiale » laquelle est protégé par :

• L’art. 8 de la CEDH ;

• L’art. 12 de la Déclaration universelle des droits de l’homme de l’ONU ;

• L’article 2 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 ;

• L’art. 9 du code civil ;

• L’art. II-7 de la Charte des droits fondamentaux de l’UE ;

• Et selon la jurisprudence du Conseil constitutionnel du 10ème § du Préambule de la Constitution de 1946.

Moralité : Les pères, parents pauvres de la protection contre les licenciements, peuvent, peut-être, espérer engendrer et materner dans la sérénité.


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