Chronique ouvrière

Requête de Claude PERRAUD

mercredi 15 août 2007

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Le texte de la requête de Claude PERRAUD.pdf

COUR EUROPEENNE DES DROITS DE L’HOMME

Conseil de l’Europe
Strasbourg, France

REQUÊTE

présentée en application de l’article 34 de la convention européenne des Droits de l’Homme,
ainsi que des articles 45 et 47 du règlement de la Cour.

I. LES PARTIES

A. LE REQUERANT.

PERRAUD Claude Georges.
Sexe : masculin.
Nationalité française. Retraité.

Représenté par Marie-Laure DUFRESNE-CASTETS
Avocat
Domiciliée au 12 rue Pasteur 14000 CAEN
Tél : 02 31 85 54 43 Fax : 02 31 85 83 85

B. LA HAUTE PARTIE CONTRACTANTE

L’Etat français

II. EXPOSE DES FAITS.

Le 22 août 2004, était publié au Journal officiel de la République française le décret
n° 2004-836 du 20 août 2004 portant modification de la procédure civile (voir pièce a).

L’article 39 de ce décret abrogeait l’article R. 517-10 du code du travail, qui prévoyait qu’en matière prud’homale, le pourvoi en cassation est formé, instruit et jugé suivant la procédure sans ministère d’un avocat au Conseil d’Etat et à la Cour de cassation.

Saisi par la Confédération générale du travail d’un recours pour excès de pouvoir , le Conseil d’Etat, par son arrêt du 6 avril 2006, rejetait la demande d’annulation de l’article 39 du décret du 20 août 2004 (voir pièce b).

Le 19 octobre 2005, Monsieur Claude PERRAUD, qui s’était vu retirer 7 heures sur sa fiche de paie pour avoir fait grève pendant la journée de solidarité, saisissait la formation de référé du conseil de prud’hommes de Paris pour faire condamner son employeur au versement d’une somme de 75,85 euros.

Par son ordonnance du 17 janvier 2006, le juge des référés prud’homal, statuant en dernier ressort, disait n’y avoir à référé (voir pièce c).

Considérant ne pas avoir les moyens de s’offrir les services d’un avocat au Conseil d’Etat et à la Cour de cassation, Monsieur Claude PERRAUD, qui était au dessus du plafond exigé pour l’octroi de l’aide juridictionnelle, renonçait à se pourvoir en cassation.

III. EXPOSE DE LA VIOLATION DE LA CONVENTION, AINSI QUE DES ARGUMENTS A L’APPUI.

1) Le Conseil d’Etat, par son arrêt du 6 avril 2006, a considéré que « les disposition du décret du 20 août 2004, qui mettent fin à des dispenses de ministère d’avocat devant la Cour de cassation, ont pour objet tant d’assurer aux justiciables la qualité de leur défense que de concourir à une bonne administration de la justice en imposant le recours à des mandataires professionnels offrant des garanties de compétence ; qu’eu égard à l’institution par le législateur d’un dispositif d’aide juridictionnelle, l’obligation de ministère d’avocat ne saurait être regardée comme portant atteinte au droit constitutionnel des justiciables d’exercer un recours effectif devant une juridiction ; qu’elle ne sont pas davantage contraires à un principe de libre choix du mode défense en matière prud’homale, qui ne ressort d’aucun des principes ni des règles mentionnées plus haut » (règles et principes de valeur constitutionnelles, principes généraux du droit) (voir pièce b).

Le Conseil d’Etat a ainsi suivi les conclusions de son commissaire du Gouvernement, qui faisait valoir, s’appuyant sur l’arrêt M. et Mme HOFFMANN du 21 décembre 2001 (Rec. 653) qui s’était prononcé sur la légalité des dispositions réglementaires rendant obligatoires le ministère d’un avocat devant les juridictions administratives, qu’ « eu égard à l’institution par le législateur d’un dispositif d’aide juridictionnelle, l’obligation de ministère d’avocat ne saurait être regardé comme portant atteinte au droit constitutionnel des justiciables d’exercer un recours effectif devant une juridiction »(voir pièce d).

Le commissaire du gouvernement et, à sa suite, le Conseil d’Etat ont superbement ignoré le moyen, qui leur était présenté à l’appui de la demande d’annulation des dispositions réglementaires litigieuses, tiré de la violation de l’article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales garantissant le droit d’accès à un tribunal. Le moyen soulignait que le système d’aide juridictionnelle mis en place auprès de la Cour de cassation se caractérise par un filtrage incompatible avec les exigences du procès équitable et que la combinaison de la représentation obligatoire pour former le pourvoi en cassation et de l’appréciation du caractère sérieux du moyen cassation pour octroyer l’aide juridictionnelle a pour effet de refuser l’accès au juge de cassation au justiciable qui n’a pas les moyens financiers de recourir aux services d’un avocat à la Cour de cassation (voir pièce e).

Mais un examen attentif du système instauré par l’article 39 du décret du 20 août 2004 fait ressortir que celui-ci n’est pas conforme aux exigences du procès équitable.
La Cour européenne des droit de l’homme a déjà eu l’occasion d’attirer l’attention , notamment en ce qui concerne l’accès au juge de cassation, sur ce qui peut porter atteinte « à la substance même du droit à un tribunal ».

Il doit préalablement être rappelé que la Cour a souligné que l’article 6§1 de la Convention, s’il garantit aux plaideurs un droit effectif d’accès aux tribunaux pour leurs décisions relatives à leurs « droits et obligations de caractère civil » laisse à l’Etat le choix des moyens à employer à cette fin et que l’instauration d’un système d’aide judicaire en constitue un, mais qu’il y en a d’autres, par exemple une simplification de la procédure(CEDH, 9 octobre 1979, Airey c / Irlande, série A, n° 32, § 26).

Cette simplification de la procédure, de nature à permettre un droit effectif d’accès au tribunal, caractérisait la procédure prud’homale française, des premiers juges jusqu’au juge de cassation, avant que n’intervienne le décret du 20 août 2004.

2) Le principe de libre choix du mode défense en matière prud’homale prévalait en matière prud’homale, y compris à l’occasion du traitement du pourvoi en cassation.

Les dispositions de l’article R.516-5 du code du travail permettent aux salariés concernés par une procédure prud’homale d’être assistés ou représentés par un salarié appartenant à la même branche d’activité ou par un délégué syndical ou par le conjoint ou par un avocat.

Cette pluralité des défenseurs possibles était permise, en cas de saisine de la Cour de cassation, par les dispositions de l’article R.517-10 du code du travail qui prévoyaient qu’ « en matière prud’homale, le pourvoi en cassation et formé, instruit et jugé suivant la procédure sans ministère d’un avocat au Conseil d’Etat et à la Cour de cassation ».

Laisser le salarié se défendre seul ou confier ses intérêts à un défenseur non rompu aux arcanes de la formulation des moyens (et de l’éventuelle subdivision en branches) de cassation pouvait susciter des inquiétudes sur l’effectivité d’un réel accès au juge de cassation, en cas d’absence du ministère de l’avocat à la Cour de cassation.

Mais la procédure sans représentation obligatoire devant la Cour de cassation offrait alors des garanties appréciables.

Le fascicule 772 du Jurisclasseur de procédure civile, consacré à la « procédure sans représentation obligatoire devant la cour de cassation » souligne « qu’il y a un équilibre à trouver entre deux préoccupations .D’une part, le souci de ne pas opposer le barrage de l’ésotérisme aux justiciables que le nouveau Code de procédure civile dispense de l’obligation de recourir au ministère d’un avocat au Conseil d’Etat et à la Cour de cassation. D’autre part, la recherche de l’efficacité, qui conduit à exclure toute argumentation insusceptible de revêtir la moindre portée eu égard au rôle spécifique de la Cour de cassation, laquelle, comme il est souvent rappelé, ne constitue pas un troisième degré de juridiction ».

C’est pour cela que le moyen peut n’être que « sommaire » et qu’il appartient alors fréquemment au rapporteur de procéder à une véritable « reconstruction » du moyen pour l’adapter aux normes de présentation en usage devant la Cour suprême. S’il n’incombe pas au rapporteur d’inventer le moyen, il doit le « mettre en forme », c’est-à-dire le clarifier et le structurer.

Ainsi, comme il l’a été souligné dans la requête présentée au Conseil d’Etat en vue d’obtenir l’annulation de l’article 39 du décret du 20 août 2004, il apparaît que, dans la procédure sans représentation obligatoire, le juge de cassation n’est pas dispensé de jouer un rôle que l’on peut qualifier d’ « actif », de nature à éviter l’exclusion par la Cour de cassation de la partie défavorisée. On était ici dans une logique qui rejoignait l’activité attendue dans le procès prud’homal, en vue de permettre un accès effectif au droit du travail.

Et il doit être relevé qu’avec ce système simplifié de présentation du moyen, qui caractérisait la procédure sans représentation obligatoire, n’était pas sans résultats.

Par exemple, en 2002, 24,91 % des pourvois présentés par un avocat devant la Cour de cassation ont donné lieu à l’intervention d’un arrêt de cassation. Ce pourcentage était loin d’être ridicule, lorsque le pourvoi était formé et instruit sans l’assistance d’un avocat : il était de 16, 63 % (voir pièce f).

C’est cette procédure simplifiée, applicable au traitement des pourvois en matière prud’homale, qui a été abrogée par les dispositions de l’article 39 du décret du 20 août 2004, qui ont mis fin à la dispense du ministère d’avocat devant la Cour de cassation.

3) Dans son arrêt du 6 avril 2006, le Conseil d’Etat, pour rejeter la demande d’annulation de l’article 39 du décret du 20 août 2004, s’est prévalu de l’existence d’un dispositif d’aide juridictionnelle.

Au regard de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l’aide juridique, l’octroi de l’aide juridictionnelle est subordonné, en ce qui concerne l’accès à la Cour de cassation, à la double exigence de ressources inférieures à un plafond (réévalué annuellement) et d’un moyen sérieux de cassation (apprécié par le bureau établi près de la Cour de cassation, qui est présidé par un magistrat de la Cour de cassation en activité ou honoraire et qui comporte en plus deux membres choisis par la Cour de cassation).

Par son arrêt AERTS c / Belgique, la Cour a déjà eu l’occasion de juger que le filtrage des demandes d’aide juridictionnelle devant la Cour de cassation belge, filtrage fondé sur la justesse de la prétention, portait atteinte à « la substance même du droit à un tribunal » (CEDH, 30 juillet 1998, Aerts c / Belgique, Recueil des arrêts et décisions, 1998, V, 1964 et s.).

Le système de filtrage d’accès à la Cour de cassation fondé sur l’appréciation du moyen sérieux de cassation laisse parfois songeur.

Il a récemment été rappelé l’affaire d’une salariée, qui, après avoir vu sa demande d’aide juridictionnelle auprès de la Cour de cassation rejetée pour défaut de moyen sérieux, a pu poursuivre la procédure devant la Cour de cassation parce qu’une organisation syndicale a avancé le montant des honoraires dus à l’avocat au conseil d’Etat et à la Cour de cassation et, au final, a obtenu gain de cause, la Cour de cassation ayant accueilli son moyen… (voir pièce g).

Dans un autre arrêt, GNAHORE c / France (CEDH, 19 septembre 2000, Recueil des arrêts et décisions, 2000, X, 422 et s.), la Cour n’a pas considéré que l’appréciation d’un défaut de moyen sérieux de cassation pour refuser l’aide juridictionnelle constituait un obstacle au droit à un juge. Mais, pour arriver à cette conclusion, sans contredire l’arrêt AERTS, la Cour a souligné qu’en l’espèce le requérant agissait dans une matière (l’assistance éducative), dispensée de représentation obligatoire.

Même sans aide juridictionnelle, il pouvait former son pourvoi. Et la Cour s’est attachée à souligner que « s’il est difficile pour un profane d’exposer un moyen de cassation, elle constate que la procédure sans représentation obligatoire obéit à des règles spécifiques (articles 983-995 NCPC) et se trouve de ce fait notablement simplifiée par rapport à la procédure avec représentation obligatoire (articles 973-982 NCPC) ; ainsi, par exemple, les règles strictes de l’article 978 NCPC relatives à la présentation des moyens de cassation ne s’appliquent-elles pas ».

C’est ce qui a conduit la Cour, dans cette affaire, à juger que le système de filtrage mis en place par le dispositif d’aide juridictionnelle instauré auprès de la Cour de cassation était compatible avec les exigences du procès équitable.

Mais, aujourd’hui, la situation a changé.

La combinaison de la représentation obligatoire pour former le pourvoi en cassation et de l’appréciation du caractère sérieux du moyen de cassation pour octroyer l’aide juridictionnelle a pour effet de refuser l’accès au juge de cassation au justiciable qui n’a pas les moyens financiers de recourir aux services d’un avocat à la Cour de cassation.

L’atteinte à « la substance même du droit à un tribunal » est incontestable.

4) Monsieur Claude PERRAUD, du fait de l’intervention de l’article 39 du décret du 20 août 2004, ne pouvait plus former un pourvoi lui-même ou avec l’assistance d’un défenseur syndical ou d’un avocat non spécialisé devant la Cour de cassation et bénéficier de la procédure simplifiée applicable au traitement du pourvoi présenté dans le cadre d’une procédure sans représentation obligatoire devant la Cour de cassation

Il n’était pas non plus fondé à solliciter l’aide juridictionnelle, étant donné que la moyenne mensuelle de ses revenus était supérieure au plafond exigé en 2006 pour l’aide juridictionnelle totale (859 euros) ou partielle (1288 euros).

Il bénéficiait certainement d’un moyen sérieux de cassation. La formation de référé du conseil de prud’hommes a refusé de juger que le fait pour un employeur de défalquer à hauteur de 7 heures la rémunération d’un salarié pour cause de grève pendant une « journée de solidarité » qui, du fait de la loi, ne devait pas être rémunérée, constituait un trouble manifestement illicite, après avoir considéré que l’office du juge des référés lui interdisait d’interpréter l’article L.212-6 du code du travail et de se prononcer sur la hiérarchie des normes en cause…

Mais vu la somme qui était en jeu, 75,85 euros, Monsieur Claude PERRAUD n’a pas voulu supporter le coût de la suite de la procédure devant la Cour de cassation.

En matière prud’homale, la montant des honoraires d’un avocat au Conseil d’Etat et à la Cour de cassation varie en moyenne entre 2500 et 3000 euros. Il y avait ici un déséquilibre manifeste entre le montant de la somme demandée en justice par Monsieur Claude PERRAUD et le coût occasionné par un pourvoi devant Cour de cassation, du fait de la représentation obligatoire.

La Cour de cassation, notamment en matière de référé prud’homal, est amenée à donner des indications précieuses sur la définition du trouble manifestement illicite en droit du travail.

Le fameux arrêt de la Cour de cassation Madame PONSOLLE affirmant le principe « à travail égal, salaire égal » a été rendu à l’occasion du pourvoi formé contre une ordonnance rendue par la formation de référé du conseil de prud’hommes de Toulouse (voir pièce h).

Et il doit être ici relevé que c’est sans les services d’un avocat au Conseil d’Etat et à la Cour de cassation qu’a été obtenue la cassation de décisions de « juges du fond » qui avaient refusé de conclure à l’existence d’un trouble manifestement illicite en présence d’un « consentement rétroactif » à une modification du contrat de travail (voir pièce i) ou d’un refus de réintégration d’un salarié protégé à la suite du retrait de l’autorisation de son licenciement (voir pièce j).

Le barrage financier qui a empêché Monsieur Claude PERRAUD de saisir la Cour de cassation pour qu’elle exerce son contrôle sur les définitions du rôle du juge des référés et du trouble manifestement illicite proposées par l’ordonnance prud’homale qui avait considéré qu’il n’y avait pas lieu de statuer sur sa demande a porté une atteinte certaine à la « substance même du droit à un tribunal ».

IV. EXPOSE RELATIF AUX PRESCRIPTIONS DE L’ARTICLE 35 § 1 DE LA CONVENTION.

Décision interne définitive : arrêt du Conseil d’Etat du 6 avril 2006 (pièce b).

En ce qui concerne les possibilités de recours.
Monsieur Claude PERRAUD s’est vu notifier le 19 janvier 2006 l’ordonnance par laquelle la formation de référé du conseil de prud’hommes de Paris a rejeté sa demande tendant à ce qu’il soit mis fin au trouble manifestement illicite constitué par l’amputation de sa rémunération pour avoir fait grève le lundi de Pentecôte (voir pièce c).

Il était alors indiqué à Monsieur Claude PERRAUD que le recours susceptible d’être exercé contre cette ordonnance était le pourvoi en cassation et il lui était rappelé les dispositions du nouveau Code de procédure civile imposant, pour l’exercice de cette voie de recours, la constitution d’un avocat au Conseil d’Etat et à la Cour de cassation.

Monsieur Claude PERRAUD, qui avait demandé au juge des référés prud’homal la condamnation de son employeur au versement d’une somme de 75,85 euros, considérait ne pas avoir les moyens financiers de recourir aux services d’un avocat au Conseil d’Etat et à la Cour de cassation.

Après s’être renseigné, il a appris que s’il avait formé un pourvoi non présenté par un avocat au Conseil d’Etat et à la Cour de cassation, ce pourvoi aurait été déclaré irrecevable (voir Cass. Civ., 5 mars 1969, Bull., II, n° 69).

Il lui a également été expliqué que l’arrêt de la Cour de cassation prononçant l’irrecevabilité de son pourvoi n’était susceptible d’aucune voie de recours, la décision d’irrecevabilité ne figurant pas parmi les exceptions permettant de revenir sur une décision rendue par la Cour de cassation (voir « Effets et suites des arrêts de la Cour de cassation », Jurisclasseur procédure civile, Fasc. 798, (3) à (8) ).

Les dispositions de l’article 39 du décret du 20 août 2004 sont des dispositions réglementaires, qui peuvent faire l’objet d’un recours pour excès de pouvoir.

Le recours pour excès de pouvoir est un « recours d’utilité publique, qui doit pouvoir être exercé par le plus grand nombre de personnes possible » et « l’intérêt personnel à agir dont le requérant doit justifier est libéralement apprécié, au point qu’à certains égards le recours pour excès de pouvoir est proche de ce que serait une « action populaire » (exerçable par n’importe qui)… » (voir R. CHAPUS, Droit administratif général, Tome 1, 15e éd., 788).

Dans le délai de deux mois courant à partir du 22 août 2004 (date de publication des dispositions litigieuses), Monsieur Claude PERRAUD aurait donc été recevable à exercer un recours pour excès de pouvoir contre l’article 39 du décret du 20 août 2004.

Mais , d’une part, Monsieur Claude PERRAUD n’avait pas connaissance de ce texte et, d’autre part, à l’époque, il n’était pas confronté aux problèmes suscités par l’obligation d’une représentation devant la Cour de cassation en matière prud’homale. (C’est le 19 octobre 2005 que Monsieur Claude PERRAUD a engagé une action devant le juge des référés prud’homal).

Le droit administratif français permet à une personne victime d’une disposition réglementaire illégale de contester cette décision, malgré l’expiration du délai de recours pour excès de pouvoir.

En effet, la disposition réglementaire contestée, « n’étant pas une décision juridictionnelle, n’acquerra pas pour autant une autorité qui la rendrait incontestable. Elle ne peut plus être attaquée de front, mais, dans certaines limites, elle peut faire l’objet d’une contestation oblique d’un grand intérêt pratique » (voir R. CHAPUS, op. cit., 803).

A l’appui d’un recours formé contre une décision procédant de celle qui est devenue définitive (la « décision de base »), le justiciable peut invoquer une exception tirée de son illégalité. Et cela, à toute époque.

Seulement, pour que cette « exception d’illégalité » de l’article 39 du décret du 20 août 2004 puisse être soulevée par Monsieur Claude PERRAUD, il aurait fallu que lui soit ouvert le recours contre une décision d’irrecevabilité qui aurait été prononcée par la cour de cassation, s’il avait présenté son pourvoi tout seul ou avec l’aide d’un défenseur non habilité à intervenir devant la Cour de cassation.

Or, comme il l’a été relevé un peu plus haut, ce recours n’était pas possible.

De surcroît, même si Monsieur Claude PERRAUD avait eu la faculté de contester la décision d’irrecevabilité prononcée par la cour de cassation, la discussion sur la conformité aux dispositions de l’article 6 de la Convention européenne de l’article 39 du décret du 20 août 2004 n’aurait eu aucun effet utile.

Le Conseil d’Etat n’aurait pas examiné la question soulevée par Monsieur Claude PERRAUD avant le 6 avril 2006. Or, par son arrêt définitif rendu à cette date, le Conseil d’Etat a conclu à la validité des dispositions de l’article 39 du décret du 20 août 2004.

C’est cette inexistence de voies de recours internes, accompagnée d’une inutilité d’un éventuel recours, qui conduit Monsieur Claude PERRAUD à s’adresser à la Cour européenne des droits de l’homme pour faire juger l’incompatibilité des dispositions de l’article 39 du décret du 20 août 2004 avec les exigences du procès équitable.

V. EXPOSE DE L’OBJET DE LA REQUETE.

Il est demandé à la Cour de juger que les dispositions de l’article 39 du décret du 20 août 2004, qui mettent fin en matière prud’homale à la dispense d’un avocat au Conseil d’Etat et à la Cour de cassation, portent atteinte à la substance même du droit à un tribunal et, par là-même, violent l’article 6 § 1 de la Convention.

VI. AUTRES INSTANCES INTERNATIONALES TRAITANT OU AYANT TRAITE L’AFFAIRE.

Aucune.

VII. PIECES ANNEXEES.

a) Décret du 20 août 2004 portant modification de la procédure civile.
b) Arrêt du Conseil d’Etat du 6 avril 2006.
c) Ordonnance rendue par la formation de référé du conseil de prud’hommes de Paris le 17 janvier 2006.
d) Conclusions du commissaire du gouvernement sous l’arrêt du Conseil d’Etat du 6 avril 2006.
e) Texte du mémoire ampliatif déposé à l’appui de la requête tendant à l’annulation de l’article 39 du décret du 20 août 2004.
f) Statistiques des décisions sur les pourvois devant la Chambre sociale de la cour de cassation pour l’année 2002.
g) Arrêt de la Cour de cassation du 22 février 2006, plus la note du Droit Ouvrier.
h) Arrêt de la Cour de cassation du 29 octobre 1996, plus la note du Droit Ouvrier.
i) Arrêt de la Cour de cassation du 16 janvier 2001, plus la note du Droit Ouvrier.
j) Arrêt de la cour de cassation du 30 avril 2002.

VIII. DECLARATION ET SIGNATURE.

Je déclare en toute conscience et loyauté que les renseignements qui figurent sur la présente requête sont exacts.

A Caen, le 25 septembre 2006

Marie-Laure DUFRESNE-CASTETS


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