Chronique ouvrière

La RATP suspendue pour excès de vitesse dans sa répression disciplinaire des agents grévistes !

jeudi 14 février 2008 par Pascal MOUSSY
CE 11 Février 2008.pdf
ceci est un fichier .pdf à lire avec Acrobat Reader

L’article 5 de la loi du 21 août 2007 sur le dialogue social et la continuité du service public dans les transports terrestres réguliers de voyageurs prévoit une obligation de déclaration préalable de participation à la grève mise à la charge des salariés recensés par un accord collectif de prévisibilité. Il est précisé qu’est passible d’une sanction disciplinaire le salarié qui n’a pas informé, au plus tard 48 heures avant de participer à la grève, le chef d’entreprise ou la personne désignée par lui de son intention d’être gréviste.

Chronique Ouvrière a déjà eu l’occasion de publier un commentaire dénonçant la remise en cause du droit de grève mise en œuvre par ces dispositions (voir P. Moussy, « La loi du 21 août 2007 : un texte visant à sauvegarder les intérêts des voyageurs ou à organiser la continuité de la remise en cause du droit de grève des travailleurs des transports ? », Chronique Ouvrière du 7 novembre 2007).

Mais la RATP a tenu à en rajouter une louche.

Faisant abstraction du principe qui veut que le salarié, seul titulaire du droit de grève, ne soit pas tenu de cesser le travail pendant toute la durée indiquée par le préavis (voir Cass. Soc. 12 janvier 1999, Dr. Ouv. 1999, 76 et s., note A. de Senga ) et puisse, par voie de conséquence, rejoindre un mouvement de grève déjà engagé (voir Const. Const. Déc. N° 227-555 DC du 16 août 2007, Liaisons Sociales des 20-21 août 2007), la RATP a élaboré un « plan de prévisibilité » avançant l’échéance de l’obligation de déclaration préalable à 48 heures avant l’heure de début de chaque préavis.

Transportée par son enthousiasme à jouer le matamore envers les futurs grévistes, la RATP a donc entretenu une confusion abusive entre le début du préavis et l’entrée effective dans le mouvement de l’agent gréviste.

Le juge des référés du Conseil d’Etat a été amené à entrer en voie de régulation, face à cette précipitation particulièrement dangereuse pour le libre exercice du droit de grève.

Il a, fort logiquement, mis en œuvre les pouvoirs qui lui sont conférés par l’article L.521-1 du Code de justice administrative.

Il a tout d’abord constaté l’existence d’une situation d’urgence, une grève pouvant se déclencher à tout moment et l’application des dispositions répressives du « plan de prévisibilité » aux agents ne respectant pas les modalités de déclaration préalable imposées par la RATP étant susceptible de causer aux salariés dont le syndicat requérant défend les intérêts un préjudice grave et immédiat.

Il a ensuite relevé que le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions légales relatives au délai dans lequel doit s’effectuer la déclaration préalable était propre à faire naître un doute sérieux sur la légalité des dispositions concoctées par la RATP.

Le juge des référés en a déduit qu’il y avait lieu d’ordonner la suspension des dispositions du « plan de prévisibilité » en tant qu’elles peuvent entraîner le prononcé de sanctions disciplinaires contre les agents qui ne respecteraient pas les modalités et délais de la déclaration préalable qu’elles prévoient.


Accueil du site | Contact | Plan du site | Espace privé | Statistiques | visites : 136294

     RSS fr RSSJurisprudence commentée RSSLibertés publiques   ?